L’article revient sur les grands axes de ce plan interministériel : repérage précoce des troubles du sommeil, encadrement des prescriptions de somnifères et de mélatonine, diffusion d’outils de dépistage en médecine de ville mais aussi vigilance sur le sommeil des soignants eux-mêmes. Médecins généralistes, infirmiers libéraux ou pharmaciens sont invités à adopter une nouvelle posture clinique face à un enjeu de santé publique longtemps sous-estimé.
Camille, publié le 01/08/2025 - 5 min de lecture
Le sommeil est aujourd’hui reconnu comme un enjeu majeur de santé publique. Pourtant, il reste encore sous-évalué dans le parcours de soins. En réponse à cette lacune, le ministère de la Santé et de l’Accès aux soins a présenté, en juillet 2025, une feuille de route interministérielle pour 2025-2026.
Ce plan national, centré sur la promotion d’un sommeil de qualité et la prévention des troubles du sommeil, mobilise de nombreux secteurs. Cependant, ce sont les professionnels de santé de premier recours qui sont les premiers appelés à agir.
Un Français sur deux dort mal. Cette situation s’est aggravée ces dernières années, avec une progression marquée chez les enfants, les adolescents mais aussi chez les adultes actifs. Or, les conséquences du manque de sommeil ou d’un sommeil de mauvaise qualité sont graves : augmentation du risque de maladies cardiovasculaires, d’obésité, de diabète de type 2, de dépression et de troubles cognitifs, sans oublier un lien avéré avec certaines maladies neurodégénératives.
Face à ce constat, la feuille de route invite les professionnels de santé à changer de posture. Il ne s’agit plus de considérer le sommeil comme un simple symptôme ou une plainte secondaire mais bien comme un indicateur clinique à interroger systématiquement, au même titre que la douleur, l’hygiène de vie ou la santé mentale.
Pendant longtemps, le sommeil a été perçu comme un sujet secondaire en médecine générale. Souvent abordé en fin de consultation, il n'était ni exploré de manière systématique, ni intégré dans les outils de dépistage. Or, la feuille de route 2025-2026 pose les bases d’un changement : elle propose de faire du sommeil un réflexe médical, un indicateur de santé à part entière.
Depuis janvier 2025, le carnet de santé de l’enfant a été mis à jour pour inclure des rubriques spécifiques sur le sommeil, permettant d’initier le dialogue dès le plus jeune âge. Pour les adultes, les consultations de prévention incluent désormais un repérage structuré des troubles du sommeil, grâce à des outils cliniques standardisés qui seront progressivement diffusés à l’ensemble des soignants.
Ce nouveau cadre encourage les professionnels de santé à intégrer le sommeil dans chaque consultation, quelle qu’en soit la raison initiale. Derrière une fatigue persistante, une irritabilité ou une baisse de performance cognitive peut se cacher un trouble du sommeil non diagnostiqué.
Un autre enjeu important de la stratégie 2025-2026 concerne les usages thérapeutiques liés au sommeil. Ces dernières années, on observe une banalisation du recours aux benzodiazépines et à la mélatonine, souvent en dehors de tout cadre médical structuré. L’automédication progresse, en particulier chez les adolescents, les étudiants et les personnes présentant des troubles du neurodéveloppement.
La feuille de route propose de renforcer la vigilance sur les prescriptions, de diffuser des recommandations claires à l’attention des professionnels et de valoriser les approches non médicamenteuses : éducation à l’hygiène du sommeil, techniques de relaxation ou encore adaptation des rythmes de vie.
Cette approche vise à redonner aux soignants une place centrale dans l’accompagnement thérapeutique, loin des réponses médicamenteuses de court terme, en misant sur des interventions durables et personnalisées.
La feuille de route n’oublie pas les professionnels de santé. Horaires décalés, gardes de nuit, surcharge mentale, etc. Le sommeil des soignants est souvent mis à rude épreuve, avec des effets bien connus sur leur santé physique et psychique mais aussi sur leur vigilance et leur qualité de vie au travail.
Le ministère prévoit d’ici fin 2025 des recommandations spécifiques pour les établissements hospitaliers, portant sur l’organisation du travail et la prévention de la désynchronisation des rythmes biologiques. Par ailleurs, la formation initiale et continue des soignants va intégrer davantage de contenus liés à la physiologie du sommeil, ses troubles et leur prise en charge.
C’est une avancée importante pour une profession trop souvent exposée sans protection à la fatigue chronique, au stress prolongé et au risque d’épuisement.
En faisant du sommeil une priorité nationale, cette feuille de route offre aux professionnels de santé une opportunité concrète de renforcer la prévention personnalisée, de lutter contre les inégalités sociales de santé et d’agir de manière transversale sur de nombreuses dimensions de la santé publique.
Les enjeux sont multiples avec une réduction de la consommation de médicaments, une amélioration de la santé mentale, une meilleure réussite scolaire, la baisse des accidents liés à la somnolence ainsi qu'une diminution des pathologies chroniques. Cependant, pour que cette stratégie réussisse, encore faut-il que les pratiques cliniques évoluent sur le terrain.
Le sommeil, en tant que déterminant de santé, croise de nombreuses problématiques cliniques abordées dans nos formations : santé mentale, prévention des maladies chroniques, gestion du stress, accompagnement des patients en situation de vulnérabilité, etc.
Autant de leviers pour renforcer le rôle des soignants dans une approche globale et préventive de la santé.
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