Comment dépister le burn out chez votre patient en tant que professionnel de santé ?

Le burnout, ou l'épuisement professionnel, est un phénomène de plus en plus répandu dans notre société actuelle. En tant que professionnel de santé, il est important de pouvoir détecter les signes de burnout chez vos patients afin de leur fournir un soutien approprié. Dans cet article, nous allons explorer les signes et symptômes du burnout, ainsi que les méthodes de dépistage que vous pouvez utiliser afin d'identifier les patients à risque.

Manel, publié le 25/05/2023 - 5 min

Médecin généraliste

IDEL

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1. Reconnaître les symptômes du syndrome de l'épuisement professionnel

Le syndrome d'épuisement professionnel, également connu sous le nom de burn out, est une affection qui peut toucher les professionnels qui sont confrontés à un stress élevé et à des exigences émotionnelles importantes dans leur travail.

Le burn-out est systématiquement associé à des sentiments pénibles qui s'installent insidieusement et de manière chronique. Il rassemble des symptômes psycho-émotionnels ou physiques, ainsi que des troubles du comportement.

Voici quelques symptômes courants du burnout :

Épuisement émotionnel : Le patient se sent épuisé, débordé et dépassé par ses responsabilités professionnelles. Il manifeste l'impression de ne plus rien avoir à donner, d'être "vidé" émotionnellement.

Détachement émotionnel : Le patient manifeste un retrait vis-à-vis du travail ou des sentiments de négativisme ou de cynisme liés au travail.

Diminution de la performance professionnelle : Le patient vit une perte d'efficacité professionnelle et une perte de motivation quand il s'agit de réaliser ses tâches.

Sentiment de perte de contrôle : Le patient se sent impuissant et incapable d'influencer les choses de manière positive et de faire faces aux exigences professionnelles.

Problèmes de santé physique et émotionnelle : Le patient peut également subir des troubles de ses fonctions cognitives tels qu'une dégradation de la mémoire, de l'attention, de la concentration, etc.

Symptômes comportementaux ou interpersonnels : Le patient peut ressentir une méfiance ou une rigidité envers autrui, une attitude cynique ou de toute puissance pouvant mener à des conduites de risque pour soi-même ou pour autrui. Il s'agit d'attitudes dites défensives : résistance excessive au changement, des attitudes négatives ou encore pessimistes.

La difficulté que nous rencontrons dans la présentation de la symptomatologie du burn-out est la multitude de signes et manifestations cliniques, ils sont, bien entendu généralisables, mais également et surtout, singuliers en fonction de chaque individu et non spécifiques à l’épuisement professionnel. Par exemple, les troubles du sommeil, les troubles sexuels, digestifs, les épisodes répétés d'infections ORL... Ces symptômes se retrouvent dans les cas de burn-out mais pas seulement, ils peuvent camoufler des pathologies psychiatriques ou somatiques plus importantes.

De même, on peut observer des troubles comportementaux tels que l'irritabilité, la fatigue chronique, l'apathie, l'agressivité, la labilité émotionnelle (sautes d'humeur), etc., dans les cas de burn-out. Cependant, il est important de souligner que ces symptômes ne sont pas exclusivement caractéristiques du syndrome d'épuisement professionnel.

Dépister le burnout en tant que professionnel de santé - organisme dpc / fifpl

2. Les différentes étapes de la manifestation de l'épuisement professionnel

Les manifestations du burn-out suivent généralement un ensemble d'étapes qui se produisent dans un ordre spécifique et presque constant. Le processus commence souvent de manière similaire :

L'engagement : Un enthousiasme idéaliste est la première étape que nous constatons chez les patients présentant un épuisement professionnel. En effet, ils aiment leur travail et l'investissement. Leur travail est une grande source de satisfaction et de bonheur.

Le sur-engagement : durant cette phase, le premier symptôme de burn-out apparaît. Il s'agit de l'épuisement professionnel. Une fatigue permanente durant laquelle la satisfaction et la motivation qu'ils pouvaient trouver dans l'exercice de leur profession disparaissent peu à peu. Une fatigue physique et morale, qui ne trouve d'apaisement ni dans le repos ni dans les vacances. Cette sensation d'être "à bout de force", "au bout du rouleau" qui aurait la prédictivité péjorative la plus importante.

La résistance : Le sur-engagement précédemment expliqué se transforme peu à peu en acharnement. Le patient refuse de constater l'évidence d'une souffrance et d'un surmenage. Il est alors dans le déni, il s'accroche pour continuer ce rythme.

L'effondrement : Le moment où le patient "craque", il ne peut plus y arriver. Toutes les sphères de sa vie sont impactées et on assiste à un effondrement total de toutes les dimensions de vie de la personne : les dimensions psychiques, émotionnelles et physiques. Le professionnel n'est plus du tout en capacité de prendre des initiatives et de poursuivre son travail.

Le patient finira ensuite par s'instaurer une apathie, une incapacité à ressentir quoi que ce soit, à être ému, etc.

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Attention

Les symptômes du burn out peuvent être le signe d'autres problèmes de santé. Il est donc important de réaliser un diagnostic par un professionnel de la santé qualifié pour déterminer les causes sous-jacentes des symptômes et élaborer un plan de traitement approprié. Le médecin traitant qui coordonne la prise en charge pourra adresser son patient à un psychiatre.

3. La démarche diagnostique

Comme nous avons déjà pu l'évoquer, le burn-out est un ensemble de symptômes qui nécessite une démarche diagnostique. Celle-ci vise à caractériser la sévérité du trouble, son type diagnostique et ses liens avec les conditions de travail. Le syndrome d’épuisement professionnel n’est pas une maladie caractérisée.

La démarche diagnostique va permettre de caractériser le syndrome en repérant les pathologies potentiellement sous-jacentes comme:

  • Un trouble de l’adaptation,
  • Un trouble anxieux,
  • Un trouble dépressif,
  • Un état de stress post-traumatique.

Il est primordial d'accorder un intérêt particulier au risque suicidaire qui doit également être évalué.


Cette démarche implique une recherche des facteurs de risque. Un bilan somatique doit rechercher une pathologie organique associée qui aurait pu se manifester par certains des symptômes cités précédemment. L’analyse des conditions de travail est faite prioritairement avec le médecin du travail, ou le centre de consultation de pathologie professionnelle. Les symptômes sont le point de départ d’une démarche diagnostique. Nous pouvons constater la lourdeur de cette démarche diagnostique. En effet, la symptomatologie et les manifestations cliniques sont tellement variées, singulières en fonction de chaque individu que la tâche n'est pas aisée.

Cette démarche diagnostique rencontre un autre obstacle : l'épuisement professionnel n'est pas reconnu comme une maladie à part entière, ni comme une nouvelle catégorie de pathologie psychiatrique, et par conséquent, il n'est pas classifié en tant que tel.

Dans le DSM, l'ouvrage permettant de référencer une classification des troubles mentaux, tous décrits de façon claire, concise et systématique, aucune définition sur le Burn-out n'est spécifiée. Dans le CIM-10, la classification statistique internationale des maladies et problèmes de santé connexes établie par l'OMS, le burn-out apparaît dans les "difficultés liées à l'orientation de son mode de vie". Pour justifier le remboursement par les caisses d'Assurance Maladie, il est nécessaire d'utiliser le terme de dépression pour qualifier les personnes victimes de burn-out. Ce qui démontre une nouvelle fois, la complexité et les difficultés diagnostiques voire incohérences rencontrées.

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4. Le "profil-type" et les facteurs à risques

A. Le "profil-type"

Si nous devions établir ce fameux “profil-type”, nous pourrions décrire des professionnels : impliqués, volontaires, enthousiastes présentant un besoin de réussite très important et pour qui la profession occupe une place démesurément prépondérante. 

La plupart des victimes de burn-out sont des personnes investies, bienveillantes et généreuses, se dévouant corps et âme à leurs tâches.

Ils ont tendance à donner toujours plus sans pouvoir prendre en considération leurs propres besoins, c'est à leur détriment et au détriment de leur famille et de leurs amis qu'ils surinvestissent leur lieu de travail.

L’un des traits majeurs que nous retrouvons est le caractère anxieux des personnes. Nous ne sommes pas tous égaux face à la gestion du stress. En effet, certains individus trop envahis par les manifestations d'un stress trop important ne peuvent fonctionner correctement dans leurs tâches au travail. Ils peuvent se sentir rapidement submergés, pris de cours, dans l'impossibilité d'accéder à leurs ressources. Ces personnes peuvent ne rien accomplir ou quasiment rien et pourtant ressentir une fatigue intense en fin de journée.

D’autres au contraire, pour éviter ce stress, certains accomplissent énormément de travail, agir pour ne pas ressentir est le meilleur moyen pour s’ignorer. Malgré ce dévouement au travail, ils ne peuvent s'empêcher de ressentir une insatisfaction, un sentiment de ne pas avoir assez donné, assez fait ou pas assez bien, qu’ils devraient à l’avenir travailler davantage, obtenir de meilleurs résultats. Ils éprouvent un sentiment d’inquiétude, d’insécurité, quasi permanent. Ce qui a pour effet, à long terme, de les rendre inefficaces. 

B. Les facteurs de risque

La recherche des facteurs de risque commence par l’analyse des conditions de travail. Cette analyse se base sur une démarche structurée et coordonnée par le médecin du travail avec l’appui d’une équipe pluridisciplinaire (ergonome, psychologue du travail, etc.).

Elle peut s’appuyer sur les six catégories de facteurs de risques psychosociaux suivantes tirées du rapport Gollac qui sont :

L'intensité et l'organisation du travail : surcharge de travail, imprécision des missions, objectifs irréalistes, volume de travail qui provoque un manque de sommeil important.

Conflits de valeurs : lorsque votre patient perd de vue le sens même de son travail, de ses missions.

L'insécurité : l'insécurité de l'emploi mais également sur le lieu de travail de votre patient (risque de violence physique ou morale sur son lieu de travail).

Autonomie et marge de manoeuvre : le travail est ressenti comme routinier et laisse peu de marge de manoeuvre.

Les relations au travail peuvent être affectées par des conflits interpersonnels, un manque de soutien collectif, et d'autres facteurs similaires. En réalité, la reconnaissance et l'appréciation du travail accompli sont des éléments fondamentaux de toute relation professionnelle et jouent un rôle essentiel dans cet environnement.

5. La prise en charge du burn out du patient

La prise en charge du burn out vise, bien sûr, à traiter le trouble identifié, mais également à agir sur le contexte socioprofessionnel à l’origine du syndrome. La prescription d’un arrêt de travail est le plus souvent nécessaire.

Le médecin traitant coordonne la prise en charge du burn out. L’intervention d’un psychiatre peut être sollicitée notamment pour réaliser un diagnostic psychopathologique ou une adaptation thérapeutique, prendre en charge un trouble sévère ou renouveler un arrêt maladie. Si le patient souffre de troubles anxieux ou dépressifs, un traitement par antidépresseurs peut être prescrit.

Le traitement du trouble peut comporter une prise en charge non médicamenteuse fondée sur des interventions psychothérapeutiques ou psychocorporelles effectuées par un professionnel de santé ou un psychologue formé à ces techniques.

L’analyse du poste et des conditions de travail est indispensable. Elle est réalisée par l’équipe pluridisciplinaire coordonnée par le médecin du travail. Des actions de prévention (individuelle et/ou collective) sont préconisées en conséquence. Avec l'accord du patient, il est crucial que le médecin traitant se mette en contact avec le médecin du travail ou celui d’une consultation de pathologie professionnelle pour alerter et avoir un éclairage sur les conditions de travail.

La prise en charge des aspects médico-socioprofessionnels et psychologiques est indispensable, notamment pour aider les patients dans leurs démarches médico-administratives, telles que l'orientation vers les consultations de pathologie professionnelle ou les services d'assistance sociale.

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Et les soignants dans tout ça ?

Le burnout est particulièrement répandu dans les professions d'aide et de soins. Dans ces métiers, la qualité de la relation avec autrui revêt une importance essentielle, car elle peut avoir un impact significatif sur les patients bénéficiant de ces services. Les professionnels de la santé, qu'ils soient en activité ou en formation, sont particulièrement touchés par l'épuisement professionnel. Plusieurs facteurs les rendent vulnérables, tels que la confrontation à la souffrance et à la mort, la nécessité d'être intimement impliqué dans les soins des patients, la complexité des dispositifs de soin, les tensions démographiques et l'insécurité.

Il est donc primordial de fournir aux soignants une prise en charge du burn out spécifique au moyen d'un réseau de soins adapté.

Tout d'abord, il est essentiel de vérifier si cette fatigue n'est pas causée par une autre condition médicale en réalisant un bilan sanguin. Vous pouvez ensuite en parler à votre médecin traitant ou à votre médecin du travail, qui pourra vous prescrire un arrêt de travail si nécessaire et vous orienter vers un psychologue ou un psychiatre.

6. Ressources

Fiche mémo par la Haute Autorité de Santé : "Repérage et et prise en charge cliniques du syndrome d’épuisement professionnel ou burnout"

Guide d'aide à la prévention par la DGT, Anact et l'INRS : "Le syndrome d’épuisement professionnel ou burnout : Mieux comprendre pour mieux agir"

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