Le bilan diagnostique podologique : les renseignements socio-administratifs et l’anamnèse

Cet article explore les étapes cruciales du bilan diagnostique podologique, en commençant par la collecte des renseignements socio-administratifs indispensables pour un suivi optimal des patients âgés. Il détaille ensuite l'importance d'une anamnèse exhaustive, permettant d'émettre des hypothèses diagnostiques et de définir un projet thérapeutique. L'article fournit également des conseils sur l'évaluation des douleurs avec des outils validés comme l'échelle visuelle analogique et le questionnaire de douleur de Saint-Antoine.

Florian, publié le 23/07/2024 - 5 min de lecture

Pédicure-podologue

1. Renseignements Socio-Administratifs

C’est ici que votre bilan commence. Avant toute chose, assurez-vous que votre patient consent de façon libre et éclairée à réaliser cette consultation et qu’il comprend bien les tenants et aboutissants des outils présentés et utilisés. Inscrivez le dans votre dossier, vous pouvez passer à la suite.

Le recueil complet et précis des renseignements socio-administratifs représente la première étape du bilan clinique. Parfois négligé, il apporte pourtant des informations précieuses pour le suivi des patients âgés. Ces renseignements doivent porter sur :

  • Les conditions de vie et de travail, d’habitat, l'entourage socio-familial, en particulier lorsque le sujet ne peut lui-même assurer ses soins car vous êtes régulièrement en contact direct avec les aidants des patients âgés, famille et/ou proches ;
  • Le parcours de soins ;
  • Les coordonnées des autres professionnels de santé intervenant auprès du patient.

2. Anamnèse, Évaluation du Patient et du Risque de Perte d’Autonomie

Réalisée à la suite du recueil des renseignements socio-administratifs, l’anamnèse se doit d’être la plus exhaustive possible. À la fin de celle-ci, vous devez pouvoir émettre vos premières hypothèses diagnostiques et définir une pré-orientation de projet thérapeutique.

Pour cela, surtout chez les sujets âgés, il faut commencer par rechercher les antécédents médicaux et chirurgicaux ainsi que les éventuelles comorbidités. La HAS, dans sa recommandation, conseille de répertorier les pathologies : métaboliques (diabète), rhumatologiques, musculosquelettiques (entorses, fractures), neurologiques (AVC, troubles moteurs et/ou sensitifs), néoplasiques, neurodégénératives (démences, sclérose en plaques), cardio-vasculaires, sensorielles, allergiques, infectieuses (HIV, hépatites), dermatologiques.

Il est également recommandé de recueillir des informations sur les traitements en cours, les sujets âgés étant souvent polymédicamentés (anticoagulants, antalgiques, antidiabétiques, etc), les vaccinations (COVID-19, tétanos, grippe, etc) et les addictions (tabac, alcool, stupéfiants). La connaissance des examens biologiques récents peut aussi être pertinente, ceux-ci permettant de suivre avec précision les marqueurs biologiques de diabète ou encore d’inflammation. Plus simplement, il vous sera également utile de connaître le poids et la taille de vos patients.

Vous avez accès au Dossier Médical Partagé (DMP) et donc à des informations pouvant compléter votre anamnèse. Il vous est aussi conseillé de communiquer par courrier avec les différents acteurs de santé.

Mais cela ne s’arrête pas là. Une fois ces informations obtenues, il est recommandé un interrogatoire plus spécifique aux seniors sur :

  • Les douleurs ;
  • La gêne fonctionnelle en statique et dynamique ;
  • Le périmètre de marche ;
  • La survenue de chutes ou pertes d’équilibre ;
  • L’altération des fonctions cognitives ;
  • L’altération de l’indépendance fonctionnelle (repas, toilette) ;
  • Le niveau d’activité physique et sportive ;
  • La variation de masse ;
  • L’évolution de la force musculaire ;
  • L’utilisation de dispositifs médicaux (audition, vision, dentaire, podologique) et aides techniques à la marche ;
  • Le port de dispositif de compression veineuse (chaussettes ou bas de contention).

Grâce à ces informations, vous serez alors en mesure d’évaluer les douleurs et leur retentissement fonctionnel, l’Indice de Masse Corporelle (IMC), le chaussage, l’hygiène cutanée, la présence de troubles cutanés et unguéaux, la mobilité articulaire, l’équilibre et plus globalement la qualité de vie et l’état de fragilité.

3. Évaluation de la Douleur

De nombreux seniors sont des patients présentant des douleurs. L’analyse sémiologique, l'étude des signes et des symptômes dans le diagnostic des maladies, et étiologique, l'étude des causes et des facteurs qui contribuent au développement d'une maladie, doit être complétée par une évaluation qualitative et quantitative de la douleur.

Plusieurs outils d’évaluation validés sont à votre disposition pour vous aider dans cette tâche. Idéalement, le même outil devra être choisi pour évaluer la douleur, avant et après traitement.

L’échelle visuelle analogique (EVA) est probablement l’outil d’évaluation fiable de la douleur le plus connu et répandu. Très simple à mettre en œuvre, elle permet une autoévaluation simple, reproductible, sensible aux variations d’intensité douloureuse, offrant un choix de réponses non mémorisables par le patient d’une évaluation à l’autre.

L’échelle verbale simple (EVS) est un autre outil, moins sensible que l’EVA mais encore plus simple, fiable et facile à comprendre. Ici, le patient doit simplement verbaliser un qualificatif correspondant à l’intensité de sa douleur. À chaque qualificatif, un score est attribué : Douleur absente = 0, douleur faible = 1, douleur modérée = 2, douleur intense = 3, douleur extrêmement intense = 4.

L’échelle numérique (EN) est également un outil d’autoévaluation sensible aux variations d'intensité douloureuse, se rapprochant de l’échelle visuelle analogique à la seule différence que la réglette ne présente que la face graduée de 0 à 10. C’est ici le patient qui doit directement placer le curseur sur la valeur qu’il estime correspondre à l’intensité de sa douleur.

La douleur peut aussi être évaluée à l’aide de questionnaires validés dans leur version française, comme le QDSA (Questionnaire de Douleur de Saint-Antoine) qui peut être utilisé dans sa forme abrégée, potentiellement plus adaptée aux sujets âgés. Ce questionnaire contient 16 qualificatifs associés à la douleur, chacun étant noté de 0 (absent) à 4 (extrêmement fort).

En plus de ces outils d’autoévaluation, votre sensibilité d’observateur est sollicitée. La douleur peut effectivement être détectée dans la modification du comportement du patient, notamment quand il n’exprime pas spontanément sa douleur.

En cas d’autoévaluation impossible, vous pouvez utiliser une échelle d’hétéro-évaluation. Deux versions françaises et validées sont proposées par la recommandation de la Haute Autorité de Santé :

  • L’échelle Doloplus-2 : échelle d’évaluation comportementale de la douleur comportant dix items avec une cotation de 0 à 3 représentative de l’intensité de la douleur et intégrant trois domaines : somatique (cinq items), psychomoteur (deux items) et psychosocial (trois items). L’utilisation de cette échelle nécessite un apprentissage et une utilisation, si possible, en équipe pluridisciplinaire.
  • L’échelle comportementale d’évaluation de la douleur pour la personne âgée non communicante (ECPA) : cette échelle comprend huit items avec cinq modalités de réponses cotées de 0 à 4. Chaque niveau représente un degré de douleur croissante.

Dans le cas spécifique d’une neuropathie douloureuse, il est proposé, pour orienter le diagnostic, d’utiliser le questionnaire DN4. Ce questionnaire permet de faire la distinction entre la douleur neuropathique et la douleur proprioceptive.

En conclusion, un bilan diagnostique podologique complet et précis est essentiel pour le suivi des patients âgés. L'intégration des renseignements socio-administratifs et une anamnèse exhaustive permettent d'optimiser les soins. L'évaluation rigoureuse des douleurs garantit un traitement adapté et efficace.


A très vite pour un nouvel article ☀️